La criminalité transfrontalière : la drogue et la logique sécuritaire européenne

Auteur•rice•s

Wanda CAPELLER

Publication

1999

Depuis quelque temps, une nouvelle dialectique du contrôle s’installe en Europe. Jusqu’à une époque très récente, les acteurs du contrôle de chaque pays se trouvaient enfermés, à quelques exceptions près, dans leurs logiques nationales. Ils travaillaient de façon isolée, chacun dans son propre système, et ne prenaient pas en compte le caractère interdépendant du contrôle. Aujourd’hui, en revanche, on relève un souci prioritaire de structuration de nouvelles institutions du contrôle qui témoigne de quelques préoccupations majeures, comme le constat de l’expansion de la criminalité transfrontalière et transnationale, l’idée que l’abolition des contrôles frontaliers peut avoir un effet criminogène, et celle que la coopération policière internationale n’est pas encore assez orchestrée pour répondre à ces nouvelles formes de criminalité.

A partir de cette réalité, l’Union européenne détermine de nouvelles stratégies “régionales” (au sens où l’on parle de “régions globales” dans le cadre de la mondialisation) de contrôle concernant notamment les pays de l’Europe du Centre et de l’Est, ainsi que lés continents africain et, pour une large part, asiatique. Cette nouvelle institutionnalisation du contrôle est mise en œuvre au travers de pactes intergouvernementaux. C’est dans ces conditions qu’ont été ratifiés, en 1985, les Accords de Schengen par la Belgique, la Hollande, le Luxembourg, la France et l’Allemagne. Par la suite, l’ont également ratifié l’Italie, l’Espagne, le Portugal, la Grèce et l’Autriche. Les Accords de Schengen cherchent, en réalité, à établir des mesures compensatoires destinées à équilibrer les effets consécutifs à l’établissement de la libre circulation des personnes et des biens.

Or, il est vrai que les Accords Schengen ont eu une répercussion immédiate sur les affaires pénales, dans la mesure où cette convention, dans son Titre III (articles 48 et s.), dispose sur un certain nombre de matières essentielles comme la coopération policière et l’entraide judiciaire. Ce Titre III, connu comme le “Troisième Pilier”, est particulièrement important, car il est déterminant pour la coopération policière entre les pays membres. C’est dans cette partie qu’ont été introduites les innovations importantes relatives au concours des forces de police en vue d’améliorer l’efficacité des systèmes policiers des États membres.

Ce projet de recherche visait à évaluer l’impact du Système Schengen sur les pratiques locales de contrôle. L’objectif premier de cette enquête exploratoire a été de saisir l’impact du Système Schengen sur les acteurs locaux du contrôle et leurs pratiques locales et quotidiennes, notamment à partir d’une recherche effectuée sur le terrain entre deux pays limitrophes, la France et l’Espagne. On s’est efforcé de mettre en relief les nouvelles formes de contrôle afin de stimuler une réflexion sur la compréhension des interactions qui s’opèrent dans ce domaine entre la sphère globale et la sphère locale.