Suivis judiciaire et administratif des infractions aux arrêtés préfectoraux de limitation des usages de l’eau en Côte d’Or au cours de la période 2002-2005

Auteur•rice•s

Marguerite BOUTELET, Philippe BILLET

Publication

2010

L’observation de l’exercice du pouvoir préfectoral de limitation des usages de l’eau, plus particulièrement en période de sécheresse, et celle des sanctions tant administratives que judiciaires de la violation des arrêtés édictés constituent un test de la volonté politique d’assurer effectivement la préservation de l’eau et des écosystèmes aquatiques. Elles permettent également d’apprécier l’adéquation des instruments juridiques à l’objectif de protection. Pour effectuer ce test, la région Bourgogne a été retenue en raison de la variété de son réseau hydrographique et de l’importance de ses nappes, ainsi que la période 2002-2005, qui intègre la sécheresse de 2003. L’analyse du contenu des arrêtés et l’étude de la politique de poursuite des contrevenants a permis d’observer comment les intérêts écologiques sont conciliés avec les intérêts économiques et sociaux en période de pénurie, qui appelle a priori une plus grande solidarité de la part des usagers et un renforcement des contrôles administratifs.

La détermination de l’autorité administrative à protéger les écosystèmes aquatiques se révèle dans la gestion de cette période de crise. L’utilisation très ferme de l’outil répressif en 2003 a servi de moyen de pression sur les professionnels pour l’élaboration négociée d’un arrêté cadre pluriannuel de limitation des usages de l’eau dont l’objectif est d’inciter à un changement de l’affectation des sols et à l’abandon de l’irrigation dans les territoires soumis à une forte pression hydrique.

En revanche, il apparaît qu’en dehors de la période très particulière de la sécheresse de 2003, la police judiciaire n’est pas utilisée en Côte d’Or à l’appui d’une politique de sensibilisation aux intérêts qui s’attachent à la protection de l’eau. Le procureur n’est pas invité aux réunions de la Mission interservices eaux. La constatation des infractions n’est pas la priorité des services administratifs et les principaux agents verbalisateurs que sont les gendarmes et les agents du CSP (devenu ONEMA) ne reçoivent pas de consignes particulières du Parquet. Si bien que les procès verbaux sont dressés sur plaintes ou dénonciations à l’initiative de voisins ou d’associations de défense de l’environnement et dès lors souvent classés sans suite.

Ce délaissement de l’outil répressif est regrettable car il est constaté que son effet psychologique est important même pour des sanctions restées légères : une amende de 100 euros ou un rappel à la loi semblent marquer durablement ceux qui en ont fait l’objet. Une des difficultés de l’outil répressif vient de la trop grande complexité des prescriptions à respecter, notamment celles des arrêtés « sécheresse » qui sont variables d’une semaine à l’autre et posent des règles différentes selon les heures du jour. Il en résulte une grande difficulté de constatation notamment pour les gendarmes qui ne sont pas spécialisés alors qu’ils sont les plus disponibles et un risque de défaut de constitution d’infraction devant le juge. Cette complexité est avancée par les services administratifs pour justifier qu’ils ne dressent pas de procès verbaux en cas de non respect de la réglementation et affaiblissent ainsi l’effectivité et l’efficacité des arrêtés.

Cette recherche est issue de l’appel à projet sur le thème : Droit de l’environnement