Initialement, le questionnement qui a paru intéressant portait sur le mouvement de dépénalisation, observable dans certains pays européens, et en France concernant les contraventions de stationnement, et la montée en puissance, qui semblait corrélative, des sanctions administratives prononcées par des autorités administratives détenant, de par les textes, des pouvoirs répressifs. Le choix des secteurs techniques étudiés, à savoir le droit de la consommation, des prestations sociales, des transports publics routiers de marchandises, l’environnement et la santé, se justifie par l’existence d’un encadrement textuel récent ou d’une remise en ordre globale de la répression des infractions et des manquements administratifs en ces matières. La répartition des secteurs entre ceux qui sont dominés par un intérêt général éminent (santé, social et environnement) et ceux qui relèvent de l’économie marchande (consommation et transports routiers) a paru également pertinente. En outre, les secteurs concernés par l’étude présentent le point commun de voir coexister la répression pénale par les autorités judiciaires et la répression administrative par des autorités administratives classiques (préfet, directeur d’établissement public…) qui ne sont pas organisées en autorités administratives indépendantes. Dès lors, la question de savoir si les garanties de la procédure pénale s’appliquaient aux sanctions administratives et dans quelle mesure méritait d’être approfondie.
Les constatations auxquelles l’étude a abouti paraissent doublement paradoxales : d’un côté, la montée en puissance des sanctions administratives n’empêche pas la pénalisation de se renforcer, même lorsqu’une remise en ordre des textes applicables aux deux types de sanctions a été effectuée. D’un autre côté, la soumission progressive des sanctions administratives aux principes directeurs de la procédure pénale et du droit pénal substantiel, grâce à l’action des juges (applicabilité de l’article 8 DDHC, soumission au principe de proportionnalité), n’exclut pas des zones d’ombre en raison de la confusion entretenue, dans certains secteurs, entre sanctions administratives et mesures de police, et du cumul possiblement fréquent entre les deux types de sanctions pénales et administratives.
Pour autant, malgré une tentative de décryptage des sanctions existantes dans les secteurs étudiés, l’état du droit ne paraît pas satisfaisant, essentiellement en raison d’un manque de lisibilité et d’efficacité de la législation et de la réglementation pourtant foisonnante, et de l’absence d’effectivité de la répression quand l’infraction est relevée, en partie parce que les objectifs et leur hiérarchisation ne sont pas clairement définis dans les politiques publiques afférentes aux secteurs étudiés. La multiplicité des corps d’inspection ayant le même objet participe de ce manque de lisibilité. La préférence donnée à la transaction dans presque tous les secteurs révèle le souci de l’administration de maîtriser les suites des contrôles et d’être sûr qu’une sanction sera effectivement infligée, mais aussi parfois de ne pas porter une trop grave atteinte aux intérêts économiques sous-jacents dans l’inobservation des obligations professionnelles.
Une série de recommandations, éclairées par les études de droit comparé concernant l’Italie et le Royaume-Uni, clôt la recherche, notamment inspirée par la pyramide des sanctions, proposée par deux auteurs anglais et qui facilite l’articulation entre répression pénale et répression administrative. Une codification de la procédure administrative répressive, de préférence dans le cadre du code des relations entre le public et l’administration, rendrait plus lisible la répression administrative. Ces solutions juridiques ne sauraient aller sans une réflexion sur une politique répressive des différentes administrations, voire une stratégie répressive en fonction des objectifs contradictoires à concilier dans les secteurs étudiés.
Cette recherche est issue de l’appel à projet sur le thème : Le recours à la sanction administrative dans les contentieux techniques