La coordination des politiques judiciaires et pénitentiaires. Une analyse des relations entre monde judiciaire et administration pénitentiaire

Auteur•rice•s

Christian MOUHANNA

Publication

2011

Cette recherche vise à mieux appréhender un thème relativement peu abordé dans le champ de la sociologie des institutions pénales, celui des relations entre institution judiciaire et monde pénitentiaire. L’investissement limité des sciences sociales sur ce thème s’explique aisément : du point de vue légal et institutionnel, les services pénitentiaires, qu’ils relèvent du milieu ouvert ou du milieu fermé, sont considérés comme des exécutants, soumis aux ordres des magistrats. Les décisions de ces derniers faisant autorité, il serait « naturel » que les personnels relevant de l’administration pénitentiaire (AP) les appliquent sans états d’âme. Les évolutions qu’ont connues aussi bien les tribunaux que les établissements pénitentiaires ont profondément modifié cette perception. Aujourd’hui, de plus en plus de juges et de parquetiers, et de plus en plus de responsables hiérarchiques, se disent préoccupés par la nature des interactions avec les différents services pénitentiaires. A tous les échelons, nationaux, régionaux ou locaux, des passerelles ont été mises en place pour organiser la coopération entre les différents acteurs. Cela ne signifie pas que ces relations se déroulent sans aucune difficulté. Mais, dans un contexte où les moyens humains et matériels se raréfient, et où les responsabilités des uns et des autres sont recherchées quant aux modalités d’exécution des peines, il devient impossible pour les magistrats, ou au moins pour une partie d’entre eux, de se désintéresser de l’exécution des mesures décidées en amont.
Pour leur part, les personnels de l’administration pénitentiaire, habitués à gérer leurs affaires sans trop d’interventions extérieures, doivent apprendre à fonctionner avec une présence plus marquée des magistrats, du moins dans certains domaines. Cette question revêt un caractère particulièrement aigu quand on observe que l’AP mène depuis des années un travail de fond afin d’accentuer l’autonomie de ses services vis-à-vis des juridictions. Petit à petit, elle est parvenue à faire passer des textes et des réformes qui ont cherché à libérer ceux-ci du pouvoir des juges, notamment en créant une organisation et une hiérarchie des services d’insertion et de probation indépendante des juges de l’application des peines (JAP), qui les géraient autrefois. Malgré cette autonomie institutionnelle, l’interdépendance fonctionnelle entre JAP et conseiller d’insertion rend indispensable des échanges, rendus plus complexes du fait de cette double tutelle de fait.

Cette recherche est issue de l’appel à projet sur le thème :