Une réforme souhaitable mais non sans risques
Cette recherche qui s’inscrit dans la tradition de l’ethnologie juridique, dresse un premier bilan de l’activité des cours criminelles départementales. La phase expérimentale a été conduite de 2019 à 2022 dans 15 juridictions. Leur généralisation à l’ensemble du territoire est prévue en 2023. Cette réforme était souhaitable car la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l’Homme pour une durée excessive de détention provisoire des accusés. Les personnes en attente de jugement devant les cours d’assises étaient remises en liberté faute de pouvoir être jugées dans des délais raisonnables. Aussi, de nombreux dossiers d’accusés libres, sous contrôle judiciaire, étaient dans l’attente d’un jugement faute de créneaux au sein de certaines juridictions pour fixer une date d’audience. L’étude conclut que le double objectif de la loi du 23 mars 2019 a bien été atteint, les jugements en première instance étant rendus dans des délais deux fois plus courts et la véritable qualification criminelle de certains faits, tels que les viols, a été restituée. Christiane Besnier et son équipe de recherche pointent cependant certains risques, comme l’affaiblissement potentiel de l’oralité des débats, pratique aujourd’hui assurée grâce à la volonté des professionnels mais soumise à la pression managériale et au manque d’effectifs. Elles s’inquiètent aussi de la possible introduction d’un « plaider coupable » qui nuirait aux vertus restauratives de ces cours, une dimension pourtant attendue par les justiciables et que permet seule la durée de l’audience et la rencontre entre l’accusé qui reconnait les faits et la partie civile.