L’assemblée générale des membres de l’Institut des études et de la recherche sur le droit et la justice (IERDJ) s’est tenue en Grand’chambre de la Cour des comptes sous la présidence de Pierre Moscovici, Premier président de la Cour des comptes, pour déterminer le programme de travail de l’année 2024. Tous ont salué la visibilité grandissante de l’Institut, moins de deux ans après son lancement et renouvelé leur soutien à l’IERDJ.
En ouverture, Pierre Moscovici, a tenu à souligner l’importance de la recherche juridique dans le développement de la société et a encouragé l’IERDJ à poursuivre ses travaux rigoureux et innovants. Le Premier président a ensuite témoigné sa reconnaissance à l’IERDJ qui accompagne la Cour des comptes dans l’organisation de la Nuit du droit, le 4 octobre : « Peut-être est-ce l’influence de l’IERDJ qui nous pousse à organiser notre toute première Nuit du droit et nous fait davantage prendre conscience de notre nature juridictionnelle ».
Programmation scientifique : quatre nouveaux axes pour les appels à projets de recherche (APR) 2024.
Valérie Sagant, directrice de l’Institut a souligné la richesse et l’ampleur des quatre nouveaux thèmes présentés brièvement aux membres de l’assemblée générale.
Premier axe : une analyse de la notion de consentement. Celle-ci a émergé dans les débats publics non seulement autour des questions de consentement sexuel mais également dans le domaine médical, lors par exemple de la crise sanitaire Covid 19 et des campagnes de vaccination. Ce concept s’applique également au domaine du numérique et les neurosciences peuvent être amenés en renouveler l’approche.
L’Institut souhaite défricher un autre vaste sujet : droit, justice et espace qui pourrait se décliner autour de trois axes :
- la régulation des espaces faiblement anthropisés (les pôles, les espaces maritimes, l’espace extra-atmosphérique…) ;
- la gouvernance territoriale et la justice spatiale ;
- tous les enjeux juridiques autour du cyberespace.
Le troisième axe s’attachera à mieux documenter et analyser l’accès au travail des personnes placées sous main de justice. Ce thème demeure particulièrement d’actualité, en lien avec la création récente du contrat d’emploi pénitentiaire. L’accent sera mis sur les aspects moins étudiés de la question : quels sont les besoins des populations concernées ? Quelles sont les finalités de l’accès au travail pour les personnes placées sous main de justice : finalités institutionnelles, réinsertion, prévention de la récidive, finalités pour les personnels pénitentiaires en termes de « gestion » de la détention, finalités pour les premiers concernés et leurs entourages (revenus, stabilité…) ?
Enfin, une dernière proposition a été soumise à l’Assemblée : santé et environnement, poursuivant ainsi les travaux de l’Institut sur la question environnementale. Les liens juridiques entre les deux notions devront être précisées : droit à un environnement sain, santé environnementale – catégorie forgée par l’OMS en 1994 – concept de « santé durable » forgé en 2022 par le sommet de la Terre : ces liens se resserrent avec le développement d’une approche de santé plus globale (pas seulement l’absence de maladie) et les preuves des impacts de la dégradation de l’environnement sur la santé.
Quatre nouveaux axes de travail pour 2024 donc qui enrichiront ceux explorés les années précédentes et qui ont fait aboutir de nombreux travaux recherches de grande qualité selon Pascale Goetschel, directrice adjointe scientifique au CNRS, qui a exprimé : « Les remerciements, au nom du CNRS, pour tout le travail accompli. Les ambitions de l’IERDJ correspondent au souhait d’une recherche sur le long terme et également opérationnelle ».
Nicolas Bonnal, président de la chambre criminelle de la Cour de cassation représentant du Premier président, a quant à lui salué la vitalité et l’engagement de l’IERDJ dans la réflexion et la mise en relation entre les différents acteurs : « Je m’inscris dans la tonalité très positive des succès et des efforts déjà acquis par l’Institut. Nous en avons eu des démonstrations tout à fait concrètes avec des échanges très vifs entre les magistrats de la chambre criminelle et des chercheurs de l’IERDJ sur des recherches qui n’avaient, elles, rien d’ésotériques mais bien ancrées dans notre réalité et notre réflexion professionnelles ».
Les grandes thématiques de travail en 2024
Outre la proposition de quatre nouveaux appels à projets de recherche, Valérie Sagant a présenté le programme de travail de l’année à venir tel qu’il se dessine. Certains axes pluriannuels se poursuivent.
Droit, justice et numérique : de nombreux travaux ont été entamés cette année, notamment lors de la journée d’études « Politiques et pratiques du numérique dans la justice » du 12 juin dernier, une grande conférence Cyberjustice Europe 2023 qui se tiendra au Conseil de l’Europe le 24 novembre prochain, un état des connaissances dont la publication interviendra fin 2023 et sera complété au cours de l’année 2024. L’Institut priorisera également deux axes majeurs et ancrés dans les années à venir : les impacts de l’intelligence artificielle sur nos métiers ainsi que les nouvelles configurations d’audience par le numérique.
Les métiers du droit et de la justice : La conclusion du groupe de travail pluridisciplinaire lancé en mai 2022 fera l’objet d’une nouvelle étude de l’Institut en cours de finalisation. Par ailleurs, l’Institut lance un programme d’ateliers de réflexion sur le vaste thème « Femmes et Justice » qui mobilisera des travaux sur la question de la féminisation des métiers de la justice et sur l’égalité femmes-hommes, travaux qui seront élargis à la question des femmes justiciables. Enfin, l’IERDJ approfondira ses travaux pour des professions encore peu étudiées sous la forme de journées d’études.
La justice économique : Plusieurs recherches sont en cours : outil d’analyse de la conformité des stipulations, les smart contracts ; transaction pénale… Les actes de Conventions qui rendront compte de dix années de débats entre acteurs économiques, juridiques, diplomatiques, et associatifs sur les enjeux de la régulation de la mondialisation sont en cours de finalisation.
Justice et guerre : Le cycle de séminaires s’achèvera le mois prochain et donnera lieu à une publication ainsi qu’un état des connaissances courant 2024.
Une montée en puissance de l’Institut
Revenant sur un premier bilan de la mise en place de l’Institut, Valérie Sagant a relevé « qu’en presque deux ans d’existence, l’IERDJ a intensifié son travail de recherche et exploré de nouvelles thématiques porteuses et innovantes pour les acteurs du droit et de la justice mais aussi à l’attention des justiciables ». Outre l’analyse et la compréhension des enjeux juridiques contemporains, l’Institut s’est également fortement concentré sur la communication, la valorisation et la production d’événements sous différents formats (colloques, conférences, journées d’études, ateliers et séminaires) mettant en lumière les travaux de recherche et la nécessité d’échanges entre universitaires, chercheur.es, juridictions, professionnel·les, responsables publics, ainsi que les citoyen·nes.
Une accélération saluée par Carine Chevrier, secrétaire générale du ministère de la Justice : « Cette montée en puissance remarquée est aujourd’hui tangible. Les colloques et manifestations que vous organisez ainsi que les travaux de recherche que vous soutenez et publiez sont appréciés. Le Ministère restera toujours soutenant. Nous saluons les réflexions que vous avez menées autour de l’organisation des métiers dans le champ de la Justice ou de manière très concrète, ce que vous initiez en matière de transformation numérique dans le Justice. »
Laurent Fabius, président du Conseil constitutionnel, a quant à lui « salué le travail déjà été mené » et souligné « l’importance et la nécessité de développer encore plus les actions de communication et de diffusion des connaissances auprès de tous les publics », à l’instar des d’importants efforts réalisés pour la valorisation de la première étude « Droit(s) des générations futures » publiée par l’IERDJ en avril 2023. Complétant l’intervention du président du Conseil constitutionnel, Didier Tabuteau, vice-président du Conseil d’État et ancien président de l’IERDJ jusqu’en décembre 2022, a précisé : « Il serait souhaitable que nos services de communication s’associent à la diffusion de vos recherches, afin que vos publications puissent être atteintes depuis les divers sites de nos institutions puisque nous sommes partenaires de sorte que cela puisse aider l’IERDJ à toucher un plus large public. »
Pierre Chevalier, en qualité de directeur des affaires juridiques du Groupe Caisse des dépôts, a tenu également à exprimer son soutien : « Dès l’origine, nous avons pris part à la constitution de l’Institut et je souhaiterais insister sur les travaux de veille qui nous importent au plus haut point, précisément ceux qui concerne le droit de l’entreprise ou la vie des acteurs économiques ».
Cette assemblée générale a permis de souligner l’importance cruciale de la recherche sur le droit et la justice pour le développement de la société et a marqué le début de nouveaux axes de travail pour l’Institut qui devra encore élargir son influence par la poursuite et l’approfondissement de la promotion de ses travaux.
Crédit photo @claireruiz.photographie/IERDJ