Cette recherche a pour objet les représentations des travailleurs sociaux qui accompagnent des mineurs en situation de prostitution dans le cadre de l’aide sociale à l’enfance (ASE) et de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). Malgré la loi n°2002-305 du 4 mars 2002 qui énonce que « la prostitution des mineurs est interdite sur tout le territoire de la République » (Art. 13), cette pratique semble être en augmentation et prendre des formes plurielles (ECPAT, 2017). La question de la prise en charge éducative de ces adolescents et jeunes adultes en situation de prostitution est cruciale. En France, dans son ensemble, les études sur la prostitution des mineurs sont peu présentes voire inexistantes, en dehors de reportages plus médiatiques que pose la réalité du problème. Si différents universitaires (Lavaud-Legendre, Peyroux, 2014, Sebtaoui, Harrison, 2017) et associations (ECPAT, 2017 ; ACPE, 2017) se sont intéressés à la typologie des mineurs en situation de prostitution et à leurs parcours de vie, les études épidémiologiques sont rares ainsi que la recherche sur l’intervention des professionnels auprès de ce public (Lavaud-Legendre, Tallon, 2016). De rares études soulignent la complexité, le malaise des travailleurs sociaux à accompagner des mineurs en situation de prostitution ou ayant subi des multiples traumatismes sexuels (Lanctôt, Lachaine, 2002 ; Peled, Lugadi, 2015), ce qui a un impact manifeste dans l’accompagnement éducatif des mineurs (Anderson & al., 2016).
Interroger les représentations et les limites des professionnels dans la prise en charge de ces mineurs en fonction de leurs mandats, judiciaire ou social, est nécessaire pour faire émerger des recommandations au niveau des pratiques et que les professionnels puissent mieux appréhender ces situations. À notre connaissance, nous n’avons recensé aucune étude similaire en France. La démarche collaborative proposée vise à étudier la problématique de la prostitution juvénile dans les deux contextes sociaux et légaux différents que sont la France et la Canada. En collaboration avec une équipe canadienne interuniversitaire, cette recherche permettra d’analyser des données existantes, de recenser des études, politiques sociales et dispositifs d’accompagnement au Canada et en France, de comparer les cadres conceptuels des deux pays, et de mener des entretiens semi-directifs à partir de la méthode qualitative consensuelle avec des professionnels. Ultimement, ce projet permettra d’émettre des recommandations au niveau des pratiques, et ce, afin que les professionnels puissent mieux appréhender les situations de prostitution des mineurs.