Les discriminations dans les relations de travail devant les cours d’appel. La réalisation contentieuse d’un droit fondamental

Auteur•rice•s

Bernard BOSSU

Publication

2014

Cette recherche a pour objectif d’étudier les pratiques contentieuses devant les Cours d’appel pour mesurer la réalité des discriminations dans les relations de travail et les évolutions possibles du droit. Dans ce cadre, il convient de s’intéresser aux circonstances, événements, actions ou encore comportements qui vont pousser à l’action en justice. Cette étude va aussi permettre de comprendre comment le droit des discriminations est appréhendé par les juges du second degré. Qu’est-ce qui caractérise, selon les Cours d’appel, une discrimination ? Quelles sont les sources mobilisées ? Quel est le niveau d’exigence requis pour considérer que les éléments produits par le salarié sont suffisants pour présumer l’existence d’une discrimination ? Quelles sont les justifications avancées par l’employeur ? La question de la réparation, en particulier de l’appréciation du préjudice en cas de licenciement illicite, doit aussi faire l’objet d’une attention particulière. La méthode de recherche consiste à questionner les bases de données, en particulier JURICA, pour réunir un nombre suffisant de décisions. Plus précisément, l’étude repose sur un corpus de 1578 arrêts rendus entre 2006 et 2013. Plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette recherche. D’un point de vue statistique, il apparait que la moitié des décisions reconnaissent l’existence d’une discrimination et que celle-ci porte principalement sur l’activité syndicale, le genre (sexe), l’état de santé et l’âge. Au stade de l’action en justice, le salarié à tendance à démultiplier les motifs possibles de discrimination pour obtenir satisfaction. La discrimination est présumée si des éléments précis sont invoqués, le juge ne se contente pas de motifs vagues. Dès lors que la présomption de discrimination est reconnue par le juge, il est très difficile pour l’employeur de remettre en cause celle-ci par des éléments objectifs. En résumé le mécanisme de répartition de la charge de la preuve est correctement maîtrisé. En revanche, des zones d’ombre demeurent. Une certaine confusion existe dans le maniement des concepts (discrimination, égalité de traitement et harcèlement), ce qui engendre des problèmes de frontières. Il est aussi très difficile de comprendre le mode de calcul des dommages-intérêts, les chefs de préjudice étant rarement précisés.