Archives orales des acteurs de la justice du XXe siècle

Auteur•rice•s

Sylvie HUMBERT

Publication

2018

Ce que nous appelons « Archives orales », c’est l’histoire du présent qui s’écrit alors que les témoins et acteurs sont encore vivants. Notre travail porte donc sur la seconde moitié du XXe siècle. La mémoire judiciaire du XXe siècle constitue notre objectif mais elle ne peut être détachée de la mémoire individuelle des personnes entendues. Leurs souvenirs sont mis en lien avec des événements historiques et politiques. Parmi ces événements sont référencés entre autre la seconde Guerre Mondiale, la Ve République, la guerre d’Algérie, Mai 1968, l’arrivée du syndicalisme, l’abolition de la peine de mort. Après une présentation générale des magistrats interrogés, expliquant le déroulé de leur carrière, un découpage par période ou par recoupement d’événements a été construit.

Douze entretiens de magistrats forment le corpus de cette recherche. Deux femmes et 10 hommes nés entre 1920 et 1950 : parmi lesquels : Simone Rozès (1920), Armand Lemaire (1922 – 1917), Pierre Arpaillange (1924 – 1917), Jacques Patin (1928 – 2016), Pierre Truche (1929), Jean-Claude Xuereb (1930), Bernard Fayolle (1938), Henri-Claude Le Gall (1941), Bruno Cotte (1945), Jean-Pierre Getti (1947), Claude Grellier (1948), Irène Carbonnier (1950).

Durant leur carrière, le premier poste semble avoir occupé une grande place car les souvenirs des témoins sont très précis. Cinq magistrats entrent en fonctions juste après la 2nde Guerre Mondiale. Leurs souvenirs font état de cette époque, des difficultés de rendre la justice. Ce sont souvent des magistrats déjà en fonction et plus anciens qui leur ont enseigné la pratique. Cette initiation a eu des répercussions sur l’exercice même de la justice. Chaque poste a été présenté comme un nouveau métier, que ce soit des postes élevés dans la hiérarchie judiciaire : Président de la Cour de cassation, Président de la Cour de justice de la République, Directeur des affaires criminelles et des grâces, Secrétariat général de la Présidence de la République, ministre de la Justice, ou des postes liés au développement de la justice internationale. Les réformes de 1958 ont beaucoup fait évoluer l’organisation de la justice mais le vrai tournant, c’est 1968 avec l’arrivée du syndicalisme. La parole des juges se libère et des innovations sont proposées pour faire avancer le droit et la justice : incrimination nouvelles, inculpation de personnalités ou de chefs d’entreprise, sanctions contre des juges… La médiatisation a des incidences très fortes sur les procès, notamment les procès d’assises. Se pose alors la question de l’indépendance de la justice, celle du parquet et des relations avec les ministres et celle des juges du siège qui subissent les contrecoups lorsqu’une décision est prise en opposition aux attentes de la société.