Depuis la conclusion du premier traité bilatéral d’investissement en 1959, le droit international des investissements a fait de l’encouragement et de la protection des investissements ses fondements et ses priorités absolues. Dès lors, les États, désireux d’attirer des investissements internationaux et d’assurer la protection de leurs investisseurs à l’étranger, ont souscrit un nombre croissant de traités d’investissement garantissant des protections tels que le traitement juste et équitable et une indemnité « prompte et adéquate » en cas d’expropriation. Globalement, les accords internationaux sur l’investissement intègrent non seulement les traités bilatéraux d’investissement, mais aussi les accords de coopération économique et notamment ceux de libre-échange qui incorporent des clauses spécifiques consacrées aux investissements. La croissance exponentielle du nombre moyen de traités bilatéraux d’investissement sont à mettre en parallèle avec une progression globalement continue des flux d’investissements directs étrangers (dollars courants) depuis les années 1980, avec une accélération marquée à partir des années 1990. De nombreux travaux ont étudié l’impact des traités bilatéraux d’investissement sur les flux d’investissements directs étrangers. Ces travaux prennent en compte uniquement l’existence ou pas d’un traité bilatéral d’investissement (le plus souvent par la présence d’une variable dichotomique dans la modélisation, qui vaut 1 si un traité bilatéral d’investissement a été signé, 0 sinon), mais lorsqu’il existe très peu d’études introduisent comme facteurs explicatifs les clauses et la nature des accords. Ces autres facteurs potentiellement explicatifs des flux d’investissements directs étrangers offrent un champ quasiment inexploré, qui mérite une investigation plus poussée, i.e. désagrégée.
Ce projet analyse les types de clauses des traités dont la présence ou l’absence peut s’avérer significative pour leur efficacité. Notamment, il se décline en trois grandes parties. La première partie s’est focalisée sur l’analyse des traités, les pays retenus, et l’identification des règles de droit substantiel et procédural susceptibles d’avoir un impact sur les flux d’investissements. Dans une deuxième partie, grâce à un examen attentif de la littérature, le projet a abordé le lien entre les traités bilatéraux d’investissement et les flux d’investissements directs étrangers, le type de données et leur niveau d’agrégation. Cet examen de la littérature a servi de point d’appui à la modélisation des flux/stocks d’investissements directs étrangers. La dernière partie s’est focalisée sur la modélisation des flux/stocks d’investissements directs étrangers sortants sur la période 1980-2012.
Les résultats révèlent que la ratification des traités bilatéraux d’investissement a un effet positif et significatif sur les investissements directs étrangers sortants. Les clauses de droit substantiel et procédural des traités bilatéraux d’investissement ont été introduites comme variables explicatives ce qui constitue une avancée importante au regard des travaux appliqués qui existent déjà sur le sujet. Il en ressort que l’absence de clause sur le traitement national ainsi que des mécanismes institutionnels jouent négativement. L’accès au règlement des différends en matière d’investissements internationaux (ICSID (convention de Washington) + autres types d’arbitrage) a un effet positif et significatif. Ce type de clause favorise aussi les investisseurs, en leur permettant non seulement d’accéder au règlement des différends au niveau international mais aussi de choisir parmi plusieurs types d’arbitrage. Pour les exceptions, les résultats ne semblent pas dégager d’effets significatifs tout comme les clauses liées à l’expropriation et celle qui concerne l’absence du droit de réglementer. On peut conclure que les clauses les plus importantes pour encourager les flux d’investissement sont le traitement national, l’accès à des multiples types de règlement des différends et la présence des mécanismes institutionnels. Néanmoins, les problèmes de données et la faible disponibilité des données des stocks/flux des investissements directs étrangers a réduit le nombre d’observations exploitées pouvant engendrer des biais de sélection même si une attention particulière a été portée à la structure des échantillons restreints considérés. Des extensions en cours visent notamment à compléter la base de données et à prendre en compte les biais de sélection/d’endogénéité pour fixer la robustesse des résultats ici présentés.