L’étude de la violence en prison est un sujet d’autant plus sensible que cette organisation est d’emblée prise dans une représentation de violence consubstantielle ou dans le soupçon qu’une telle violence existe. C’est pourquoi elle demande des précautions particulières. L’équipe de recherche a ainsi mis en place un dispositif méthodologique qui multiplie les approches, dans le but de pallier aux obstacles éventuels à sa réalisation et d’accroître la fiabilité de ses résultats. Outre les périodes consacrées à l’observation, nous avons réuni plus de 520 entretiens, réalisés dans cinq établissements pénitentiaires, deux centrales, deux maisons d’arrêt et un centre de détention. Ces entretiens ont été faits pour moitié avec des détenus et pour moitié avec des personnels pénitentiaires et non pénitentiaires (médecins, infirmières, enseignants, travailleurs sociaux). S’y ajoutent des questionnaires complémentaires. Les uns ont été adressés aux surveillants des cinq établissements étudiés avec un retour de 384 questionnaires exploitables, les autres, à titre d’essai, aux détenus du centre de détention et d’une maison d’arrêt supplémentaire avec un retour inespéré de 232 questionnaires exploitables (soit un total de 616 questionnaires). Les procédures disciplinaires des différents établissements étudiés constituent une autre source de données.
La mise en perspective des différentes sources de données nous permet de proposer un certain nombre de résultats. Les questionnaires adressés aux détenus et aux surveillants, comme les entretiens, montrent, quant à la façon dont ils perçoivent le climat de la détention et les risques de violence, qu’une majorité de personnels et une majorité de détenus considèrent la prison comme un lieu plutôt violent (pour 85% des surveillants et des détenus) et plutôt dangereux (pour 59% des surveillants et 67% des détenus). Pour une majorité des uns et des autres, la violence carcérale représente une pénibilité majeure (pour 55% des surveillants) ou une préoccupation majeure (pour 60% des détenus). En bref pour ceux qui travaillent en prison, comme pour ceux qui y sont détenus, la violence est une caractéristique majeure de sa réalité.
Cette recherche est issue de l’appel à projet sur le thème : L’analyse des phénomènes de regroupement de jeunes dans les quartiers populaires: violences en prison