La dimension internationale de la justice pénale

Auteur•rice•s

Valérie MALABAT

Publication

2012

Le développement de la dimension internationale de la justice pénale depuis la seconde guerre mondiale a conduit à une superposition d’espaces répressifs. Si la dimension nationale de la justice pénale demeure forte – les États restant principalement souverains pour déterminer unilatéralement leur compétence répressive et pour élaborer leur normes pénales – elle ne s’en accompagne pas moins aujourd’hui d’une dimension régionale – illustrée par l’espace de sécurité, liberté et justice proposé par l’Union européenne à qui est accordée aujourd’hui une certaine compétence en matière pénale – et du développement de juridictions pénales internationales qui postulent de dépasser au contraire les principes de souveraineté des États et de territorialité de la répression. Ces différents espaces répressifs juxtaposés et/ou superposés ne peuvent toutefois fonctionner en autarcie et sont contraints de coopérer pour poursuivre et sanctionner les infractions commises.

L’efficacité de cette justice pénale qui dépasse les intérêts étatiques reste alors une préoccupation importante compte tenu de l’enchevêtrement des normes et de la concurrence des juges. L’amélioration de l’entraide et de la coopération internationales en matière pénale a ainsi souvent été pensée en termes d’efficacité et a par exemple conduit, dans l’espace européen, à vouloir développer un outil performant tel que la reconnaissance mutuelle des décisions de justice ou à promouvoir l’harmonisation des normes pour faciliter la coopération. Mais, jusqu’à une période récente, l’internationalisation de la justice pénale s’est faite en négligeant les droits fondamentaux des personnes concernées par le procès pénal sans doute parce que la dimension internationale de la justice pouvait paraître justifier ou légitimer un traitement particulier, dérogatoire des principes et exigences classiques du procès pénal.

Le respect des droits fondamentaux s’invite toutefois aujourd’hui avec force dans la construction et le développement de la justice internationale. Il a été observé que les divergences de protection de ces droits sont ainsi un obstacle à la coopération et il est d’ailleurs frappant de constater combien la nécessité de garantir ces droits retentit sur les méthodes de coopération. Les instruments mettant en œuvre la reconnaissance mutuelle des décisions de justice sont ainsi de plus en plus soumis au contrôle des droits fondamentaux et, si la volonté de rapprocher les droits des États membres est affichée, c’est principalement aujourd’hui pour garantir les droits des personnes dans le procès pénal dans le but de faciliter la coopération. La prise en compte des droits fondamentaux doit sans doute également pousser à mieux coordonner les différents espaces répressifs. L’exigence de prévisibilité du droit qui découle du principe de légalité impose en effet que le justiciable puisse connaître le droit et la procédure qui lui seront appliqués et donc, faute d’harmonisation générale des différents droits qui n’est pas envisageable ni même souhaitable, qu’il puisse connaître son juge.

La protection des droits fondamentaux n’est donc pas qu’un objectif louable permettant de légitimer le fonctionnement de la justice pénale internationale : elle en est aussi un gage d’efficacité et c’est d’ailleurs là vraisemblablement sa meilleure chance de prospérer.