Le rapport de recherche DEFCHOR expose les résultats d’une étude des processus de mise en défaillance des entreprises qui met au jour, d’une part, la diversité des acteurs institutionnels (administratifs, juridictionnels, professionnels et associatifs) en charge du travail de prévention et de traitement des difficultés, d’autre part, les perceptions des situations et les ressources mobilisées face à ces difficultés par les chefˑfes d’entreprises. Le secteur cafés, hôtellerie, restauration (CHR) a été retenu pour l’analyse des effets de la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19.
L’étude repose sur une analyse processuelle et dispositionnelle qui considère les différentes étapes de la mise en défaillance d’une entreprise au regard des ressources (capitaux économiques, sociaux, culturels, symboliques) et des dispositions sociales activées par les chefˑfes d’entreprises pour faire face aux difficultés. L’enquête a porté sur 1/ les caractéristiques principales du secteur CHR en termes d’organisation des marchés, de profils d’entreprise et de modèles d’affaires, 2/ le travail de prévention des difficultés, 3/ l’étude du traitement juridique des difficultés des entreprises, 4/ le processus de mise en défaillance des entreprises au regard des ressources mobilisées par les chefˑfes d’entreprise dans la gestion des difficultés.
Les entrepreneurs du secteur CHR ont faiblement recours aux procédures amiables, du fait de leur faible conscience de leur existence et de leurs faibles ressources de conseil, particulièrement pour ce qui concerne les dirigeants de TPE. Ce phénomène n’est pas infléchi par la mise en place du dispositif Signaux faibles, qui utilise l’intelligence artificielle pour prédire les défaillances des entreprises, car ce dernier se limite aux entreprises de plus de dix salariés.
Alors que nous envisagions le secteur comme un site d’observation privilégié des entrées en défaillance dès 2022, la capacité des organisations de branche à construire politiquement les risques et à « objectiver » les épreuves de fragilisation des situations individuelles a eu néanmoins un effet de mobilisation des professionnels et de négociation collective d’accès aux aides d’Etat. Cette situation est d’autant plus intéressante qu’elle est le fait de professionnels dont le rapport à l’Etat a souvent été extrêmement critique. L’attention à la structuration et à l’action collective de la branche nous invite ainsi à intégrer ses initiatives institutionnelles dans l’analyse de la limitation ou de la capacité de retardement des défaillances d’entreprise.
Le fait d’avoir réalisé cette enquête avant 2024 a permis de faire ressortir l’efficacité des aides publiques, tout en soulignant le point aveugle de la situation des TPE, tant dans l’information sur les procédures amiables que dans la prise en compte des indicateurs par Signaux faibles. Les conditions du maintien d’activité étant de moins en moins réunies, le traitement judiciaire peut être fragilisé en termes de qualité dans le « passage à l’échelle » que constituerait une hausse massive des procédures visant les TPE.
Cette recherche est issue de l’appel à projet lancé en 2021 sur le thème : Les défaillances économiques
Résumé en anglais / English version below
The DEFCHOR research report presents the results of a study of the processes of business failure which reveals, on the one hand, the diversity of institutional actors (administrative, jurisdictional, professional and associative) in charge of the prevention and treatment of difficulties, on the other hand, the perceptions of situations and the resources mobilized in the face of these difficulties by entrepreneurs. The café, hotel and catering sector (CHR) was selected for the analysis of the consequences of the health crisis linked to the COVID 19 pandemic. The study is based on a processual and dispositional analysis which considers the different stages of the failure of a company with regard to resources (economic, social, cultural, symbolic capital) and social dispositions activated by business leaders to deal with difficulties. The research focused on 1/ the main characteristics of the CHR sector in terms of market organization, company profiles and business models, 2/ the work to prevent difficulties, 3/ the study of legal treatment of companies’ difficulties, 4/ the process of failure of companies with regard to the resources mobilized by business leaders in the management of difficulties. Entrepreneurs in the CHR sector rarely resort to amicable procedures, due to their low awareness of their existence and their limited advisory resources, particularly with regard to VSE managers. This phenomenon is not affected by the implementation of the Weak Signals system, which uses artificial intelligence to predict business failures, because the latter is limited to companies with more than ten employees. While we envisaged the sector as a privileged observation site for insolvencies from 2022, the capacity of sector organizations to politically construct risks and to “objectify” the tests of weakening of individual situations nevertheless had effects in terms of mobilizing professionals and stimulating collective negotiation for access to state aids. This situation is all the more interesting because it is the work of professionals whose relationship with the State has often been extremely critical. Attention to the structuring and collective action of the sector thus invites us to integrate its institutional initiatives into the analysis of the limitation or capacity to delay business failures. The fact of having carried out this research before 2024 made it possible to highlight the effectiveness of public aids, while highlighting the blind spot in the situation of VSEs, both in the information on amicable procedures and in the taking into account of indicators by Weak Signals. As the conditions for maintaining activity are less and less met, judicial processing may be weakened in terms of quality in the “scaling up” that would constitute a massive increase in procedures targeting VSEs.