De la prévention de la récidive au désengagement délinquant

Auteur•rice•s

Xavier de LARMINAT

Publication

Mai. 2022

Parcours et perceptions d’agent·es de probation et de personnes judiciarisées (France Suisse)

Cette recherche s’inscrit dans une approche critique, en filiation avec l’école sociologique de Chicago et les travaux de Howard Becker (« Outsiders : Studies in the Sociology of Deviance », 1963). Elle est basée sur des entretiens conduits auprès de personnes condamnées arrivées en fin de peine et d’agent°es de probation, l’enquête ayant été menée à la fois au sein du système pénal en France et en Suisse. Bien que ne constituant qu’une première étape d’une recherche plus vaste et plus longue qui reste à mener, plusieurs conclusions importantes peuvent en être déjà tirées.

Il apparait tout d’abord que, malgré des changements de concept pour appréhender autrement le parcours des justiciables, par la notion de « sorties de délinquances » en sciences sociales ou la notion de « désistance » en criminologie, ce rapport conclue à une persistance, non seulement dans les représentations culturelles et médiatiques mais au sein des institutions, des visions stéréotypées et stigmatisantes de « la » délinquance, du « passage à l’acte » et de la « récidive ». Xavier de Larminat et son équipe de recherche mettent en avant la notion de « désengagement délinquant » pour déconstruire ces représentations individualisantes et discriminantes et décrire des « parcours de vie » dans la complexité de leurs relations multiples et de leurs évolutions singulières.

Il ressort aussi de cette enquête, un tarissement du recrutement d’agent·es de probation disposant d’un diplôme et d’une expérience professionnelle préalable dans le secteur socio-éducatif au profit de personnes en reconversion professionnelle et de jeunes universitaires en droit ou criminologie davantage formées à un rôle d’expertise qu’à l’accompagnement de personnes confrontées à de multiples obstacles, souvent corrélés, dans leur insertion socio-économique. Le déficit de compréhension causé par l’« invisibilisation massive » des dynamiques collectives mises en lumière par la recherche sociologique conduit à des « diagnostics » erronés (déficit de motivation, inadaptation sociale, voir coup du sort), à l’incapacité d’orienter de façon pertinente les justiciables vers les structures adéquates et au renforcement de réponses contre-productives (aggravation systématique des sanctions, prolongement indirect de la peine par le stigmate du casier judiciaire). 

Un autre apport majeur de cette recherche se trouve dans les récits de vie faits par des personnes condamnées arrivées au terme de leur peine. Leur teneur ne peut se réduire à la validation de tel ou tel modèle théorique et à des conclusions générales et synthétiques. Ils permettent de saisir des processus de distanciation progressive à l’égard des activités illégales et la réalité de situations d’isolement qui restent en partie sous-estimées. 

Voir la recherche n°17.51 « Prévention de la récidive ou désengagement délinquant. Parcours et perceptions d’agent·es de probation et de personnes judiciarisées (France-Suisse) »