Le dernier numéro de la collection Actu-Recherche vient d’être publié. La publication bleue que vous aviez l’habitude de recevoir et/ou de lire a changé d’apparence et s’est muée aux couleurs du nouvel Institut. Mais le format et la ligne éditoriale restent les mêmes : nous vous invitons à la découvrir en ligne.
Cette publication lancée en 2019 par la Mission de recherche Droit et Justice est destinée à présenter sous une forme synthétique et pédagogique les principaux résultats des recherches soutenues par le GIP et à les rendre accessibles. Elle s’adresse aux responsables d’administration centrale (décideurs publics), aux professionnels du droit et de la justice et au-delà, aux chercheurs, étudiants et journalistes. Ce dernier numéro (n° 12) qui poursuit la collection est consacré aux travaux de recherche de Julie BAILLEUX, Sébastien BILLOWS et Lola AVRIL sur L’expertise économique dans le droit français de la concurrence.
En attendant de retrouver bientôt tous les précédents numéros qui figureront dans la partie explorer du site de l’Institut, retrouvez-les sur le site de la MRDJ
De même, si vous souhaitez recevoir les Actu-Recherche au format papier, dans l’attente des prochains développements du site IERDJ, merci de renseigner le formulaire en ligne sur le site de la MRDJ
Lire le résumé figurant en première page :
L’objectif de cette recherche est d’analyser les origines et la diffusion dans le droit français de la concurrence des concepts issus de l’économie. Ce champ juridique est relativement récent en France. Il s’est développé progressivement à partir des années 1950 mais surtout dans les années 1980 avec la création en 1986 du Conseil de la concurrence puis sa transformation, en 2009, en une Autorité de la concurrence dotée de pouvoirs d’enquête. Comment ce champ a-t-il évolué ? L’« économisation» de ce droit, en s’inspirant des thèses de l’École de Chicago, a-t-elle réussi, comme elle en avait l’ambition, à imposer une nouvelle expertise en rupture avec l’approche catégorielle (qualifiée aussi d’« ordolibérale ») traditionnellement pratiquée par les régulateurs et les juges ? La recherche dresse une « cartographie du droit français de la concurrence » en s’appuyant sur des approches à la fois qualitative/juridique et quantitative/statistique de décisions de l’Autorité de la concurrence et de la cour d’appel de Paris qui forment, avec la Cour de cassation, les trois piliers institutionnels de ce droit. Elle propose également une analyse sociologique des groupes sociaux (économistes, hauts fonctionnaires, magistrats, avocats) et des institutions (Autorité de la concurrence, Cour d’appel, Cour de cassation, Conseil d’État, Barreau de Paris…) pour retracer les logiques professionnelles et interprofessionnelles qui ont porté ou freiné la pénétration des économistes dans les institutions du droit de la concurrence. Les résultats de la recherche montrent que cette pénétration des experts et des raisonnements économiques est restée relativement limitée. Si la cellule spécialisée créée par Conseil de la concurrence en 2001 s’est progressivement muée en un service économique à part entière, dirigé par un chef économiste, et si la cour d’appel et la Cour de cassation ont recours aux services d’experts en économie, ces derniers conservent une position minoritaire. De plus, du fait de l’antériorité des avocats sur le marché du conseil aux entreprises, ils ont dû composer avec eux pour accéder à leur clientèle. En fin de compte, l’analyse économique s’avère faiblement prise en compte dans les décisions et les arrêts rendus en droit de la concurrence sur les ententes, abus de position dominante, échanges d’information et délimitation du marché pertinent. Il est important de saisir les tensions qui traversent ce champ particulier du droit car elles se retrouvent plus largement dans ce nouvel espace de la régulation qui brouille les frontières du droit public et du droit privé comme de la politique et de la science.