Chaque année, l’Institut des études et de la recherche sur le droit et la justice en partenariat avec les éditions Lefebvre Dalloz décernent le Prix Jean Carbonnier, récompensant une thèse exceptionnelle dans le domaine des sciences juridiques et humaines. Pour l’édition 2024, le prix a été attribué à Guillaume Grégoire, dont les travaux explorent en profondeur les interactions entre droit, économie et politique.
Un parcours académique remarquable
Guillaume Grégoire est docteur en sciences juridiques et chercheur à la Faculté de droit, de science politique et de criminologie de l’Université de Liège (Belgique). Après avoir obtenu un double master en droit et en sciences de gestion, il a entamé en 2017 sa thèse intitulée La Constitution économique : une enquête sur les rapports entre économie, politique et droit, sous la direction du Professeur Nicolas Thirion. Tout au long de son parcours, Guillaume Grégoire s’est distingué par sa méthode interdisciplinaire et son approche innovante, inspirée notamment des travaux de Michel Foucault et Reinhart Koselleck. Ses recherches l’ont conduit à explorer des thématiques complexes et actuelles, telles que la crise des dettes souveraines, les débats constitutionnels européens et l’impact des courants de pensée néolibéraux sur l’organisation économique par le droit.
Une thèse singulière sur la constitutionnalisation de l’économie
La thèse de Guillaume Grégoire s’intéresse à un paradoxe apparent : bien que les choix de politique économique soient de plus en plus inscrits dans des normes constitutionnelles bénéficiant de garanties juridictionnelles, la littérature juridique continue de promouvoir l’idée de neutralité économique des constitutions. En retraçant l’histoire du concept de « Constitution économique », le lauréat offre une analyse critique et contextualisée des tensions entre sanctuarisation juridique du marché et souveraineté démocratique.
Son travail met en lumière des enjeux majeurs pour les sociétés contemporaines : qui, du législateur ou du juge constitutionnel, doit être le gardien ultime des règles économiques fondamentales ? Comment articuler libertés économiques classiques et droits sociaux ? Quels dispositifs constitutionnels permettent d’équilibrer autonomie du marché et contrôle démocratique ? Ces questions, examinées dans une perspective comparative entre les systèmes juridiques belge, français et allemand, et le droit de l’Union européenne, enrichissent significativement la compréhension du droit économique et constitutionnel.
Une reconnaissance majeure
Le Prix Jean Carbonnier 2024 vient couronner une recherche d’une grande originalité et d’une portée théorique importante. En offrant un nouvel éclairage sur la manière dont les normes juridiques façonnent l’organisation de l’économie, Guillaume Grégoire contribue à des débats fondamentaux pour l’avenir du droit et des politiques publiques.
À travers ce prix, l’IERDJ célèbre non seulement l’excellence académique, mais aussi la capacité des travaux juridiques à interroger les fondements idéologiques de nos sociétés. Guillaume Grégoire rejoint ainsi le cercle prestigieux des lauréats du Prix Jean Carbonnier, un an après Delphine Griveaud pour ses travaux sur la justice restaurative, dont les contributions marquent durablement la réflexion juridique contemporaine.